Je trouve que pour un premier travail de doublage, l'animé Black Lagoon a été une bonne expérience pour mettre un pied dans le doublage. Étant donné que les contraintes de synchronisme sont (quasi-)inexistantes, ce travail s'est révélé être un vrai exercice d'écriture à travers lequel j'ai pris énormément de plaisir.
Alors, bien sûr, le travail n'est pas parfait et les enregistrements m'ont permis de me rendre compte des points sur lesquels je péchais encore. Au cours de ces cinq semaines de travail intensif, j'ai malgré tout pu apprendre pas mal de choses et c'est une expérience qui s'est révélée très formatrice. Même si dans l'ensemble, je pense avoir respecté l'esprit de l'oeuvre originale - et sur ce point précis, les fans seront bien entendu les meilleurs juges -, je me suis rendu compte que j'avais encore un peu tendance à vouloir faire de belles phrases, formation littéraire oblige. Malgré tout, l'univers Black Lagoon est, me semble-t-il, respecté dans le sens où le français est coloré et cru quand il faut et j'ose espérer que les fans se délecteront des fantaisies verbales que j'ai parsemées tout au long des 24 épisodes !
Car l'intérêt est bien là. Si j'avoue bien volontiers que l'univers des mangas et animés m'était étranger avant de me lancer dans cette aventure, je n'ai pas rechigné à me renseigner le plus possible sur l'univers particulier de l'animé et ses personnages et j'ai pris un énorme plaisir à faire parler français des personnages hauts en couleur. Rebby et Eda sont peut-être les personnages avec lesquels j'ai pu m'amuser le plus et les actrices ont, à ce niveau-là et à mon humble avis, fait du très bon travail.
En plus de m'avoir permis d'user d'une palette verbale on ne peut plus bariolée, cette expérience m'a confronté à la culture japonaise en général et celle de l'animé en particulier, d'où l'importance des recherches. Dans la mesure où je suis partisan de tirer les choses vers le haut et de permettre la rencontre d'une autre culture via un programme audiovisuel, j'ai laissé certaines références japonaises au lieu d'aplanir mon adaptation et de rendre le programme "comestible" pour le téléspectateur lambda - ce qui pourrait m'être reproché par une chaîne de télévision, par exemple. Au niveau du texte, je ne pense pas qu'on puisse m'accuser, comme cela a longtemps été le cas quand les animés sont apparus en France, d'avoir perverti ou dénaturé Black Lagoon.
La fin de la deuxième saison m'a aussi posé un gros problème de traduction avec les différentes scènes d'interprétariat se déroulant au Japon. Sur ce point-là, la VO me semblait tout à fait artificielle dans le sens où elle faisait parler Balalaïka en anglais, alors même qu'elle s'était toujours exprimée en japonais. J'avais pris le parti de laisser les interlocuteurs japonais en japonais et de faire parler Rock en japonais puisqu'après tout, il est natif du Japon. Balalaïka parlerait français et Rock traduirait à ses compatriotes. Même si ensuite tous les autres Japonais, en dehors des scènes d'interprétariat, parlent français, je pensais avoir choisi la version la moins artificielle. Bien sûr, la difficulté était de faire "parler" le comédien français en japonais (qui resterait malgré tout en fond sonore puisque l'important était d'avoir ce qui était dit en français par Balalaïka). Ce n'était pas impossible mais cela aurait pris beaucoup de temps.
Mais il a été décidé de faire comme dans la VO et de choisir l'anglais. Je n'ai pas eu d'autre choix que d'obtempérer.
J'attends avec une certaine impatience la sortie du DVD (le 3 mai 2010) pour avoir la réaction des fans car je considère que ce sont eux les meilleurs juges de mon travail. J'espère ne pas les avoir déçus. En tout cas, je suis prêt à répondre à toutes les questions qu'ils pourront se poser... A bon entendeur !
De par la violence visuelle, psychologique (surtout l'arc narratif concernant les jumeaux) et mon adaptation "piquante" (je n'ai jamais été aussi vulgaire de toute ma vie !), le DVD s'adresse à un public averti.
Voici la bande-annoce de la première saison (12 épisodes) :
De la seconde (12 épisodes), intitulée The Second Barrage :
Pour une discussion sur la troisième saison, Roberta's Blood Trail, éditée par Kazé, c'est ici.
Voici un petit florilège de quelques répliques qui font mouche !
En écumant la toile mondiale, je suis tombé sur un forum qui parle de la VF de leur anime préféré - Black Lagoon -, VF qu'ils ont tout simplement détestée. Qu'il s'agisse des voix ou de la traduction, la VF fait offense à cette oeuvre qu'ils chérissent : des voix de gamins et une adaptation puérile, pour résumer.
En matière de traduction/adaptation, on se heurte toujours à ce genre de choses : aucune traduction n'est parfaite et ne peut plaire à tout le monde, car il s'agit d'une interprétation (on est donc dans le domaine du subjectif). Et quand on est fan, quand on a découvert une oeuvre en VO et que c'est le coup de foudre, il est vrai que l'on va difficilement apprécier une version française, tout simplement parce qu'elle atteindra difficilement tous les affects qu'on y a mis. On aime des voix, des façons de dire les choses et il est évident que l'affect ressenti sera différent quand on passera dans une autre langue, car les voix ne seront plus les mêmes et les tournures non plus...
La première critique, en doublage, ce sont les voix, et là, visiblement elles n'ont pas plu, alors que je trouve personnellement qu'elles passent plutôt bien. Ensuite, et c'est rare, la critique s'attaque au texte. De leur point de vue, je n'ai pas été assez vulgaire (et parfois trop éloigné du texte, comme l'indiquent les sous-titres). Il faut malgré tout signaler qu'ils se basent simplement sur un extrait de quelques minutes... Mais bon, à chacun son avis. Après tout, j'ai lu ailleurs d'autres opinions d'internautes qui saluaient le "langage fleuri" qui, de l'avis de certains, fait bizarre pour une VF...
Jugez par vous-même :
S'il m'avait été donné l'occasion de sous-titrer la chanson The World of Midnight, interprétée par le personnage de Gretel dans l'épisode 15 (saison 2, épisode 3) et qui sert aussi de générique de fin à cet épisode particulier, voici ce que j'en aurais fait :
Someday I want to run
away
To the world of midnight
Where the darkness fills the air
Where it's icy cold
Where nobody has a name
Where living is not a game.
There, I can hide my broken heart
Dying to survive.
There, no one can see me cry
The tears of my lonely soul.
I'll find peace of mind
In the dark and cold world of midnight
Un jour, j’aimerais pouvoir m’enfuir
Dans le monde de minuit
Là où l’obscurité est reine
Là où le froid glace mes veines
Là où tout le monde n’est personne
Là où vivre n’a rien de frivole.
Là-bas, j’y cacherai mon cœur brisé
Mourant d’envie de subsister.
Là-bas, personne ne me verra verser
Les larmes de mon âme esseulée.
Je trouverai la paix intérieure
Dans l’obscur monde glacé de minuit.
Vous pouvez acheter le DVD sur les sites de Déclic Collection, Amazon, Alapage, Discount Manga, Price Minister et Fnac (vendeurs professionnels, produit neuf).
Attention, la licence a changé d'éditeur : Kazé a ressorti les deux saisons en DVD et Blu-Ray le 22 juin 2012.
L'intégralité des saisons 1 et 2 est disponible sur le compte officiel Dailymotion de Kaze, sur la plateforme ADN et sur iTunes.
Le film est intéressant et porté par deux excellents acteurs qui méritent d'être connus, David Strathairn et Andrew Walker.
Un côté très théâtral dans la mesure où la majorité du film se déroule dans la prison et les scènes sont portées d'abord et avant tout par la parole : entre Danny l'avocat et Mike le prévenu, de véritables joutes verbales ont lieu, avec deux styles différents. Pour ce genre de film, le sous-titrage est exigeant et difficile car chaque mot est choisi et pesé. S'il m'a semblé avoir réussi à transmettre la coloration différente des deux personnages, mon style a été quelque peu "toiletté" par la relectrice qui est passée derrière moi. Elle a fait quelques choix malheureux dans son "débroussaillage"... Cela se passe parfois comme ça, dans le monde impitoyable du sous-titrage.